mercredi 12 mai 2010

Jay Dobyns - No Angel


Jay Dobyns – No Angel 515p.
13eme Note

A une lettre d'un gamin impressionné par son récit sur les Hells Angels qui projettait de les rejoindre une fois le permis passé, Hunter S. Thompson lui répondait que ces bâtards étaient à oublier, qu'ils faisaient totalement n'importe quoi, qu'ils était tout sauf de quoi le môme devait s'inspirer pour mener sa vie et qu'ils étaient le contraire-même de la personnalité.
Quelques décennies plus tard, et si Sonny Barger roule désormais avec un pare-brise sur sa Harley à cause de sa trachéotomie, les Angels sévissent toujours et continuent à se livrer à des tas d'activités illégales dont le marchandage d'armes et le deal de drogue ne sont pas les moindres. C'est ce monde que Jay Dobyns va côtoyer de près, et rien à voir avec les pitreries alcoolisées et méthanphétaminées de Thompson où dès le départ ce dernier s'affichait comme journaliste, cet univers que Dobyns qualifiera à plusieurs reprises comme le seul et authentique mouvement américain de crime organisé et qu'il compte avec d'autres démontrer et faire chuter.
Dobyns est flic au sein de l'ATF, son boulot est l'infiltration, plus de vingt ans de service quand l'affaire avec les Angels débute.
Quand il commença ce boulot en 1987, après seulement neuf jours de travail - sans même que son premier salaire n'ait été versé - il eut le corps traversé par une balle au niveau du torse. Il dira de lui qu'il est le genre de mec aimant être prêt de l'action et voir au plus près jusqu'à quel point peuvent être des fils de putes ceux qu'il va faire tomber.
Pour infiltrer les Angels, il va falloir se faire accepter par eux, et ce sera par l'intermédiaire du club des Solo Angeles – un club de motos mexicain - que Dobyns et son clan de flics y parviendront, et presque au-delà de leurs espérances. De leur limites aussi, physiques, psychologiques, familiales. Sur la fin de l'opération qui durera 21 mois, Dobyns dira que si au départ il pensait infiltrer les Angels, l'effet inverse s'était produit, les Angels s'étaient infiltrer dans Jay Dobyns.
Il n'est plus l'homme qu'il était avant l'opération Black Biscuit, il est Jay ''Bird'' Davies, devenu accroc à des pilules énergisantes en plus de boire des Red Bull comme du petit lait, et se sera mis à délaisser à un point qu'il n'aurait imaginé sa femme, son fils et sa fille à mesure que la mission avance, et pour qu'elle réussisse. L'obstination – à en perdre la raison - un mot qui qualifie très bien Jay Dobyns.


Si l'infiltration est un succès, ses résultats juridiques seront un fiasco, en tout cas bien en deçà des attentes des responsables de l'opération et de Dobyns lui-même, quelques peines de prisons mais rien de vraiment significatif aux égards des activités criminelles des Angels. C'est surtout un tour de passe-passe juridique qui permet aux Angels de s'en sortir, la cour refusant de considérer comme viable les preuves apportées par Dobyns et son équipe. C'est aussi ce que No Angel raconte, la nécessité juridique de rester du côté de la loi en traînant avec des hors la loi pour ne pas remettre en cause la validité de ces pièces à conviction.
Si le livre s'arrête après ce simulacre de condamnations, la vie de Dobyns prend une autre tournure une fois que son identité de flic a été révélé aux Angels. Il reçoit des menaces de morts, sa maison est incendiée alors que sa femme et ses enfants s'y trouvent (mais pas lui, au point que le FBI fera de lui un suspect...), il change 18 fois d'adresse en deux ans et l'ATF le laisse tomber, lui qui avait décrocher tous les titres honorifiques de ce service-là.
Le bouquin est très bon, sec, solide, sans un pec de graisse, à l'image de bonhomme, qui aurait pu être une star de la NFL eut-il eu des cannes plus rapides. L'écriture ne fait pas dans le chichi, est d'une sincérité folle et finalement d'une honnêteté et d'une simplicité à l'image de la droiture et de l'intégrité de Dobyns lui-même. Un classique du genre autobiographique policier avec les choses de Serpico ou Joe Pistone (Donnie Brasco) et en tout cas le genre de bouquin qui vous laisse un goût de poussière, d'essence et de sang dans la bouche une fois terminé. Réalité 1 – Fiction 0. Respect.

A LIRE DANS LE PROCHAIN NUMERO D'I HATE PEOPLE:
L'INTERVIEW DE L'EDITEUR 13EME NOTE

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